23 février 2017

CFTC BPCE Sa: LE POINT JURIDIQUE SUR LA CLAUSE DE NON CONCURRENCE.



Qu’est-ce qu’une clause de non concurrence ?
La clause de non concurrence a pour objet d’interdire au salarié après rupture du contrat de travail l’exercice d’une activité professionnelle concurrentielle susceptible de porter préjudice à son ancien employeur.
Il ne faut pas la confondre avec l’obligation de loyauté, qui interdit au salarié de développer directement ou indirectement tout acte de concurrence à l’encontre de l’entreprise qui l’emploie pendant la durée de son contrat de travail.
Comment met-on en place une clause de non concurrence ?
Elle peut être prévue au contrat de travail ou par accord collectif. En revanche, si l’accord ou la convention est postérieur au contrat de travail, elle ne peut l’imposer (Cass. soc. 17/10/2000 n°98-42018). Elle peut s’appliquer dans tous les types de contrat du travail (CDD, CDI) et pour toute cause de rupture (survenance du terme d’un CDD, départ en retraite, en préretraite, démission, licenciement). Elle peut aussi être appliquée en cas de rupture de la période d’essai (Cass. soc. 22/10/2008 n°07- 42581).
Quelles conditions doit remplir la clause de non concurrence pour être valable ?
Une clause de non concurrence n’est licite que si elle répond à quatre conditions cumulatives :
  1. la nécessité de protéger les intérêts légitimes de l’entreprise ;
  2. une délimitation dans le temps et dans l’espace ;
  3. la prise en compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
  4. le versement d’une contrepartie financière.
La clause de non concurrence qui ne répondrait pas à l’ensemble de ces quatre critères encourt la nullité et l’inopposabilité au salarié (Cass. soc. 10/07/2002 n°00-45135).
  1. La protection des intérêts légitimes de l’entreprise
L’interdiction d’exercice concurrentiel d’une activité par le salarié doit porter sur l’activité réelle de l’entreprise. Cette condition s’apprécie à la fois par rapport à la nature de l’emploi, de la qualification et des fonctions exercées par le salarié, mais aussi en fonction de la nature et de l’activité de l’entreprise.
  1. La délimitation dans le temps et dans l’espace
La clause doit prévoir une durée déterminée d’interdiction de concurrence. Il n’y a pas de durée minimale ou maximale imposée par la loi mais des dispositions conventionnelles peuvent prévoir une durée maximale, que le contrat de travail devra alors respecter. Cependant, le juge pourra réduire la durée d’application d’une clause si elle lui apparait excessive sans annuler la clause si les autres conditions de validité sont respectées.
La clause de non concurrence doit aussi déterminer une délimitation géographique où l’activité concurrente est interdite. La délimitation géographique ne doit pas avoir pour effet d’empêcher le salarié de retrouver un emploi correspondant à ses possibilités professionnelles. Ainsi, une clause qui interdit toute activité de vente de matériels informatiques pendant une durée de deux ans dans tous les départements de la France métropolitaine a été redélimitée par le juge aux seuls départements où le salarié a exercé son activité au lieu de la France entière (Cass. soc. 25/03/1998 n°95-41.543P).
  1. La prise en compte des spécificités de l’emploi du salarié
La clause de non concurrence ne doit pas être insérée automatiquement dans tous les contrats de travail de l’entreprise. Elle peut se justifier en cas de crainte de perte d’un savoir faire, d’un détournement de clientèle susceptible de porter préjudice à l’activité de l’employeur. En revanche, la clause insérée dans le contrat de travail d’un salarié occupant un poste subalterne sans accès à des informations stratégiques et confidentielles pour l’entreprise ne se justifie pas. Il doit de plus exister un véritable risque de concurrence pour l’employeur, or un tel risque n’existe pas sur tous les postes. L’employeur doit donc vérifier si l’insertion d’une telle clause est pertinente compte tenu de l’emploi occupé par le salarié.
  1. Le versement d’une contrepartie financière
Le contrat doit prévoir cette contrepartie ou bien renvoyer à la convention collective qui en impose une. Cette contrepartie ne doit pas être dérisoire. Elle doit être déterminée en fonction de la durée et de l’intensité de l’atteinte portée à la liberté professionnelle du salarié. Le paiement de la contrepartie est dû même en cas de licenciement pour faute ou de démission. Le paiement intervient soit à la rupture du contrat de travail ou alors par versement mensuel pendant toute la durée de l’interdiction de concurrence. Il est interdit de prévoir que la contrepartie ne sera versée qu’à l’expiration de la période de non concurrence.
Quand la clause est-elle mise en oeuvre ?
La clause prend effet à la date de cessation effective des fonctions. En cas de dispense de préavis, elle s’applique dès le départ du salarié de l’entreprise (Cass. soc. 21/01/2015, n° 13-24471).
Attention ! La cessation d’activité de l’entreprise suite à une liquidation judiciaire ne libère pas le salarié de son obligation de non concurrence (Cass. soc.21/01/2015, n° 13-26374).
Quel est le régime fiscal et social de la contrepartie financière de la clause de non concurrence ?
La contrepartie financière a la nature d’une indemnité compensatrice de salaire. Elle doit donc être prise en compte dans le calcul de l’indemnité de congés payés. Elle est soumise aux cotisations de la Sécurité sociale, la CSG, la CDRDS et l’impôt sur le revenu.
Toute contestation en justice concernant le paiement de la contrepartie financière est possible pendant 3 ans (prescription triennale de l’action en paiement de salaire).
Que se passe-t-il en cas de violation de la clause de non concurrence par le salarié ?
C’est à l’employeur de prouver que le salarié n’a pas respecté son engagement de ne pas exercer une activité concurrentielle. Le salarié qui organise une future activité ne viole pas forcément sa clause de non concurrence, si cette activité ne prend effet qu’à l’expiration de la clause. Le salarié peut donc tout à fait engager des actes préparatoires à sa future activité tels que la recherche d’un bail commercial par exemple.
Par contre, si l’exercice d’une activité concurrentielle est avéré, l’employeur pourra obtenir des dommages et intérêts ainsi que l’arrêt des versements de la contrepartie financière pour la période restant à courir.
L’employeur pourra aussi obtenir la cessation des activités concurrentielles illicites sous astreinte devant le juge des référés.
Le nouvel employeur du salarié qui connaissait l’existence d’une telle clause et qui a embauché le salarié pourra être condamné à des dommages et intérêts pour concurrence déloyale.
L’employeur peut-il renoncer à l’application de la clause de non concurrence prévue au contrat ou à la convention collective ?
Il faut que la possibilité de renonciation soit prévue au contrat de travail. L’employeur devra respecter la procédure et le délai de renonciation prévus au contrat ou par les dispositions conventionnelles. Si aucun délai de renonciation n’est prévu, l’employeur ne pourra y renoncer que s’il libère le salarié de son obligation de non concurrence dès la rupture du contrat de travail et non en cours d’exécution de la clause, sinon il restera redevable du paiement de la contrepartie financière. De même, si l’employeur renonce tardivement à l’application de la clause, il reste redevable de la contrepartie.
En cas de dispense de préavis, la renonciation doit intervenir au plus tard à la date du départ effectif du salarié de l’entreprise (Cass. soc. 21/01/2015, n° 13-24471).

La renonciation doit être claire et non équivoque. La renonciation ne se présumant pas, l’employeur a tout intérêt à opérer sa renonciation par lettre recommandée avec accusé de réception

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